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Les chroniques de Montigny

Billet n° 2165

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Message d’utilité publique

Le doigt accusateur

N’allez jamais à l’hôpital Georges Pompidou

Chère lectrice, cher lecteur,
L’hôpital Georges-Pompidou est un bâtiment monstrueux bâti dans le 15e arrondissement de Paris.
Je le connais bien, j’habitais à côté pendant les travaux.
Les hauts fonctionnaires du ministère de la Santé ont voulu réunir toutes les spécialités médicales du monde au même endroit. L’État leur a donné carte blanche pour dépenser.
Résultat : un bâtiment cauchemardesque digne du film The Kingdom de Lars von Trier, un thriller qui se déroule dans les couloirs infinis et ténébreux d’un hôpital hanté au Danemark.

L’hôpital Georges-Pompidou est tristement célèbre depuis les suicides du cardiologue Jean-Louis Mégnien qui s’est jeté par la fenêtre le 17 décembre 2015, et de l’infirmier mort de la même manière le 6 février 2017. [1]

Mais il se pourrait bien qu’un autre spectre vienne hanter, au moins en conscience, les concepteurs fous de l’hôpital Georges-Pompidou.

La terrifiante agonie de Jean-Pierre Rouchy

On ne sait pas encore le fin mot de l’histoire mais les premiers faits qui ont filtré laissent entendre qu’il s’est produit un drame aussi aberrant qu’inhumain.
D’après le compte-rendu publié par RTL, on comprend les faits suivants : [2]
Le 25 janvier 2017, Jean-Pierre Rouchy, 47 ans, arrive à l’hôpital Georges-Pompidou, en provenance de l’hôpital St-Anne (connu pour sa spécialité en psychiatrie).
Le 28 janvier à 7 h 40, une infirmière constate qu’il n’est plus dans sa chambre. Personne, dans les couloirs, ne s’est aperçu de rien, alors qu’il s’agissait par définition d’un patient dans un état de grande fragilité psychologique et physique (il a été transféré pour une possible embolie pulmonaire), qui devrait donc être surveillé avec attention.
Mais non. Personne dans les couloirs n’avait remarqué sa disparition.
À ce stade, il y a déjà négligence grave. Mais ce n’est que le début.
Malgré cette disparition inquiétante, personne ne s’inquiète ou, en tout cas, personne ne songe à donner l’alerte.
Ce n’est que sept heures plus tard que la disparition sera signalée.
Les services de l’hôpital décident alors de déclarer que Jean-Pierre a fait « une fugue ». Il aurait quitté l’hôpital, selon eux.
Mais la famille, arrivée sur les lieux, s’aperçoit immédiatement que Jean-Pierre n’a pris ni ses chaussures ni même ses chaussettes. Dans ces conditions, elle estime certain qu’il n’a pas voulu partir dans la rue. Non. Jean-Pierre a quitté sa chambre pour, peut-être, essayer d’entrer en contact avec quelqu’un, peut-être descendre à la cafétéria comme il l’a déjà fait la veille. Et il n’a trouvé personne, et il n’a pas réussi à revenir tout seul.
Cela parait plus probable, dans ce dédale d’escaliers, de couloirs et d’ascenseurs.
Mais les fonctionnaires de l’hôpital ne l’écoutent pas. Ils estiment que c’est au commissariat du quartier de gérer ce problème, et y déposent une déclaration de disparition.
Ils demandent toutefois aux agents de sécurité de l’hôpital d’aller voir s’ils ne trouvent pas Jean-Pierre dans le bâtiment. Mais les agents de sécurité se contentent de déambuler, comme d’habitude, le long des couloirs interminables de cet immeuble kafkaïen. Il serait trop long, et trop compliqué, de pousser une à une les 5 000 portes que compte l’hôpital Georges-Pompidou et qui ouvrent sur des réduits, des salles de stockage, de matériel, etc.
La famille est de plus en plus inquiète. Elle sait qu’une tragédie est peut-être en train d’avoir lieu. Mais elle n’a aucun moyen de prendre une initiative face à une bureaucratie inerte où personne ne veut rien entendre, où on se contente de pousser des dossiers.

Comme dans les oubliettes d’un château fort

Pourtant, pendant ce temps-là, Jean-Pierre n’est en fait qu’à quelques pas de sa chambre.
Il a en effet voulu descendre vers la cafétéria. Mais il est descendu jusqu’au sous-sol, au niveau -1 qui correspond au parking, et il s’est retrouvé coincé derrière une porte par un dispositif coupe-feu qu’il n’a jamais réussi à rouvrir !!
A partir de là, on ne peut qu’imaginer le scénario horrible qui s’est passé.
Jean-Pierre, sans doute, a appelé, crié, tambouriné. Mais l’épaisse porte de sécurité, qui répond à toutes les « normes » de sécurité, n’a laissé passer aucun son.
Jean-Pierre a paniqué. Les heures se sont écoulées et personne n’est venu. Il a commencé à avoir faim, et soif. Il a eu peur.
Pendant ce temps-là, dans l’hôpital, on remplissait des papiers, des formulaires. La « procédure » suivait son cours, et rien d’efficace n’était entrepris pour retrouver Jean-Pierre.
Seule une caméra de sécurité filme l’atroce agonie dans la pièce. Seulement, cette caméra n’est reliée à aucun écran surveillé par aucune personne humaine.
La nuit s’écoule, puis la journée. Et encore une nuit. Et encore une journée. Jean-Pierre est épuisé. Torturé par la soif et la faim, il sent ses forces le quitter. Il finit par perdre conscience, mourant de déshydratation et d’inanition. Dans son supplice, il s’est sans doute réveillé plusieurs fois, comme dans un cauchemar. Puis il s’est effondré, pour la dernière fois.
Ce n’est que trois jours après sa disparition que la porte a enfin été poussée, par hasard. Le corps de Jean-Pierre gisait là, sans vie.

Personne n’est responsable

Grâce à la caméra, toutes les images sont là et peuvent être visionnées. « La caméra de l’hôpital Pompidou a filmé les trois jours d’agonie de mon frère », a déclaré Jean-Louis Rouchy, le frère aîné de Jean-Pierre. [3]
La presse évoque des « interrogations » suite à cette affaire. Une enquête a été ouverte. Mais, pour l’instant, chacun se renvoie la balle. Personne n’a reconnu sa responsabilité. « C’est pas moi, M’sieur l’agent… »
Le directeur de l’AP-HP (hôpitaux de Paris) Martin Hirsch s’est contenté d’envoyer sa réaction sur… Twitter : « L’AP-HP reconnait sa responsabilité dans les dysfonctionnements », s’est-il borné à déclarer, comme s’il s’agissait d’un incident de procédure anodin.
L’hôpital, de son côté, a annoncé que « des mesures seront prises pour éviter qu’un drame similaire se produise ».
« Des dispositifs de localisation pourraient notamment être proposés aux patients volontaires. Le système de vidéosurveillance, dont les pannes étaient connues depuis septembre 2016, est, lui, redevenu fonctionnel », peut-on lire dans les comptes-rendus [4].
Et moi, excusez-moi, mais je réponds : « Mon œil ! ».
Car cette affaire révèle avant tout deux choses :

  • que, dans nos hôpitaux ultramodernes, on peut désormais mourir comme dans les plus sombres oubliettes des temps barbares ;
  • et que les procédures, l’organisation, la planification, ont fini par nous priver de la chose qui nous est la plus précieuse, surtout dans un hôpital, où on est là pour soigner des gens : l’humain.

Une mère qui aurait perdu son enfant aurait eu tôt fait d’« ouvrir les portes » alentour pour vérifier qu’il n’était pas coincé derrière. Et quant à laisser s’écouler trois longues journées jusqu’à ce qu’il meure, c’est proprement impensable.
Mais voilà ce qu’on obtient quand on entreprend de déshumaniser la médecine et les rapports entre les gens. On perd la capacité de penser même aux évidences. Personne n’est responsable. D’ailleurs, si l’on est obligé d’écrire, de prévoir dans la procédure de « proposer aux patients un dispositif de location volontaire » au cas où ils se perdraient et pourraient mourir de faim dans un recoin de l’hôpital, c’est qu’on est arrivé au bout de la logique ou, plutôt, de l’absurdité.
Bien à vous,
Jean-Marc Dupuis

Relayé par Ecrivainparisien

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Mots clés de cet article :

Hôpital Georges Pompidou, Négligences, Mort, Patient,

Hopital_pompidou

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Les chroniques de Montigny

Billet n° 2098

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Mort dans l’indifférence (rediffusion)

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Je fais suite dans cet article à mon billet d’hier, intitulé "Minuit Chrétien" dans lequel  je parlais, entre autres choses, des déshérités.

J’ai publié, il y a fort longtemps sur cet espace un article dédié à un déshérité ayant quitté cette terre suite à une agression physique contre sa personne de la part de 3 jeunes.

Je publie donc, une nouvelle fois mon article intitulé "Mort dans l’indifférence" accompagné de l’article du parisien, seul journal ayant parlé de ce "banal" fait divers.

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La chronique de Jean Claude Lataupe

Billet n° 908

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Mort dans l’indifférence

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J’ai appris, hier soir, par l’agent d’accueil de la Chapelle, qu’un homme y ayant séjourné durant plus d’un an, est mort tout récemment des suites d’une agression qu’il a subie il y a environ trois semaines.

Aucun journal, hormis Le Parisien, n’a écrit une seule ligne sur cet homme ni même évoqué sa mort. Le drame vécu par ce « laissé pour compte» bien que ne faisant pas « vendre » dérange la conscience des « bienheureux ».

Triste constat d’impuissance et d’indifférence !

J’ai entendu parler de cet homme. Au hasard des discussions, glanées à droite et à gauche,  il ressort que cet homme était correct et bien plus que cela à vrai dire. Il était apprécié et avait de véritables amis. Il parlait avec tout le monde sans faire de discrimination d’aucune sorte.

Il a été agressé du côté de Maison Blanche, parait-il, pour de sordides raisons forcément inavouables d’après ce que j’ai pu comprendre après avoir « trié » les informations que j’ai entendues.

Cet homme s’appelait Louis Brouillard et avait l’âge d’être le père de beaucoup de personnes qu’il côtoyait journellement dans cette vie d’infortune qui était la sienne et celle de nombres de « déracinés ».

Bien que ne le connaissant pas je me devais de parler de sa mort qui nous concerne tous.

Un inconnu s’en est allé

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Je ne vous connaissais pas j’ai pourtant un immense respect pour vous

Vous avez quitté la triste communauté des hommes en ce mois d’août

Vous êtes parti, comme nombre de frères, dans l’indifférence générale

Vous étiez pourtant digne d’intérêt, vous qui n’avez jamais fait de mal.

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Vous avez vécu sous la Chapelle, près du Bon Dieu, durant plus d’un an

Aujourd’hui c’est lui qui va veiller au bien être de votre âme naturellement

Il veille sur vous comme il veillera sur vos frères avec bonté et déférence

Vous le valez bien, même si, pour certains, vous n’étiez pas une référence.

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Vous aimiez le dialogue qui vous amenait forcément à écouter les autres

Vous avez été pris à parti par des gens qui n’étaient pas de bons apôtres

Vous avez subi martyre vraiment inhumain après cette cruelle agression

Aujourd’hui vous avez été admis à la droite de notre Père à juste raison.

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Une seule journaliste a écrit un article sur ce véritable drame de la société

Ce manquement pointe un doigt très accusateur en direction de l’autorité

Je vous dédie ces mots, Louis Brouillard, pour qu’on n’oublie nullement

Je sais que Notre Seigneur aura miséricorde pour votre âme assurément.

Ecrivainparisien

21 août 2007

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La chronique de Jean Claude Lataupe

Billet n° 912

Je reproduis, ci-après, le seul article, paru dans « Le Parisien » en fin de semaine dernière ou hier, concernant Louis Brouillard dont je vous ai entretenu dans mon billet n° 908, intitulé « Mort dans l’indifférence »

Lu sur Le Parisien (date de l’article inconnue)

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La rue après une agression

(Neuilly sur Marne)

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Il avait une tête de Titi parisien. Peut-être un peu moins de gouaille, mais le caractère à la fois bien trempé et jovial. Pour tout le monde il était « P’tit Louis », un gars sans maison mais pas sans amis, qui partageait sa vie avec celles de la quarantaine de sans-domicile accueillis par l’association parisienne Cœur des Haltes à l’hôpital Maison-Blanche de Neuilly sur Marne. Jeudi soir, Louis Brouillard dit P’tit Louis est mort sur le pavé de l’avenue Jean Jaurès, à quelques dizaines de mètres du pavillon 66 qu’il regagnait chaque soir.

« Malaise cardiaque », ont conclu les secours, impuissants à ranimer le fragile sexagénaire. Mais ce malaise n’avait rien de fatal : Louis Brouillard, 62 ans, et le cœur fragile, venait de se faire agresser et frapper par trois jeunes croisés en chemin. Il était 17h30, au bord d’une nationale où ne s’élèvent que les hôpitaux de Maison-Blanche et de Ville-Evrard. Selon les témoignages de plusieurs automobilistes qui ont assisté à la scène et prévenu les secours, il aurait reçu un seul coup assez violent pour entrainer sa chute. Les trois jeunes gens se sont ensuite enfuis et ont grimpé dans un bus. Plus encore que « l’œil au beurre noir » qui marquait son visage, c’est l’émotion qui a tué Louis. Le contrecoup, sur un homme que les cahots de la vie n’ont pas ménagé.

« Tout le monde l’aimait, il n’avait que des amis »

Hier matin, dans le pavillon 66 où vivait Louis depuis deux ans, sa jovialité presque légendaire faisait place au silence et à l’abattement parmi les compagnons du SDF et les responsables de l’association. Le repas de midi s’est tristement ouvert sur deux minutes de recueillement. La bonne humeur tranquille, le regard piquant de Louis manquaient décidément dans ce pavillon dit de « stabilisation » (voir ci-dessous après l’article signé Elodie Soulié)

Francis Motemps, le directeur de l’urgence sociale à l’association connaissait P’tit Louis depuis une dizaine d’années, lorsque ce sans-abri était secouru par les maraudes à Paris et accueilli dans les foyers. « Il avait travaillé dans la mécanique de précision, croit se souvenir le représentant de Cœur des Haltes, puis il s’était retrouvé seul. Il est tombé malade et a vécu une période de vaches maigres. » Depuis deux ans, il avait sa chambre à Neuilly, de nouveaux repères et « tout le monde l’aimait, il n’avait que des amis ici », soupire Francis Motemps. Louis Brouillard gardait de loin en loin contact avec ses deux enfants, même s’il les voyait peu.

Que s’est-il vraiment passé, jeudi après-midi à trois minutes de « chez lui » ? Confiant dans l’enquête de la police judiciaire, l’entourage de Louis reste partagé entre la condamnation d’une violence gratuite et la conscience que, hélas, peut-être, le sans-abri aurait pu provoquer l’incident. A Cœur des Haltes, on ne veut pas se voiler la face : quand Louis partait ainsi vivre sa vie, comme beaucoup de ces « accidentés de la vie », il lui arrivait d’un peu trop remplir son verre. Il pouvait « avoir le verbe haut et le langage fleuri… », devenir « un peu vif ». Jamais agressif, « c’était un gentil », répète Francis Motemps. Alors même si le sexagénaire a pu croiser le verbe avec les trois jeunes aperçus par les témoins, il n’empêche, « c’est leur violence qui l’a tué, ça nous fout tous en l’air »

Elodie Soulié

Un pavillon pour les SDF vieillissants

L’Association Cœur des Haltes gère aujourd’hui deux anciens pavillons de l’hôpital Maison-Blanche, où elle accueille environ 80 sans-abris. Le bâtiment 66 est réservé depuis son ouverture, en 2006, aux SDF les plus âgés pris en charge par l’équipe de Cœur des Haltes : Tous ont plus de 55 ans, l’âge où « certains attendent d’aller en maison de retraite, d’autres un hypothétique retour dans leur famille. Mais beaucoup resteront ici », explique Francis Motemps, le directeur de l’urgence sociale de l’association. « Le principe est de toute façon de ne pas prendre en compte la notion de temps. Trois mois ou dix ans, qu’importe, ces gens ont besoin de se poser. » Logés dans des chambres doubles, pour la plupart, et quelques chambres individuelles, les hommes accueillis à Neuilly-sur-Marne peuvent y rester en permanence ou en partir quand ils le décident, « Ils vivent ici dans les règles de toute vie en communauté ». A quelques mètres, un autre pavillon héberge des hommes plus jeunes. Les 80 places d’hébergement ne connaissent en tout cas pas de morte-saison.

E.S

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Mots clés de cet article :

Drame, Mort, Agression, Louis Brouillard, Le Parisien

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