Billet d’humeur
La création
Ce soir je vais te parler d’une valeur philosophique qui fait la grandeur de l’homme et le différencie ainsi de l’animal qui ne fait que subir son passage dans l’existence terrestre.
Je vais t’entretenir de la création et des motivations qui permettent d’y parvenir.
Pourquoi la création plutôt que la pollution ou le problème de la mondialisation galopante qui uniformise des marchés asphyxiés et les annexe ?
Tout simplement parce que ce sujet me touche de près.
Les graves et sérieux problèmes que j’évoque plus avant feront l’objet et le sujet d’autres billets d’humeur.
Mais une idée vient de m’interpeller alors que j’étais en pleine composition et je ne veux pas la laisser filer et s’évanouir dans les méandres de ma mémoire.
Je vais donc immédiatement la coucher sur le papier, à chaud.
J’étais à l’élaboration d’un poème en sept strophes qui parle de l’amour qu’un père porte à son fils qui lui arrive, alors qu’il n’y croyait plus, et j’écoutais, tout en faisant délicatement se poser mes vers sur l’écran de mon ordinateur, un compact de Léo Ferré qui fait parler et récite, avec sa fougue, ses vers parfois virulents.
Il chantait un texte qui parle des poètes et j’ai eu un déclic par rapport à la création artistique.
Mais je vais te parler de la création en général, qu’elle soit industrielle, technique ou artistique.
La « vieille » Europe et la France ou l’Italie plus particulièrement, sont des pépinières, des viviers dans lesquels s’épanouissent quantité d’artistes dont la majorité œuvre dans l’ombre et ne peut, faute de moyens ou d’aide, produire ou faire produire ses œuvres riches et diversifiées.
Tous ces écorchés vifs se débattent dans des galères impensables et connaissent des soucis purement matériels qui les handicape et empoisonne le génie de leur créativité.
Au fin fond d’un bureau d’étude, un jeune ingénieur, fraîchement émoulu de l’école centrale, travaille à l’élaboration d’un robot qui doit faciliter la vie des handicapés visuels.
Ce sympathique jeune homme charismatique, passionné de recherche et d’informatique, s’est découvert, depuis quelques années, une vocation par respect pour l’âme de son père décédé des suites d’une crise cardiaque. Ce dernier n’ayant pas pu contacter les secours faute d’avoir à sa disposition un téléphone qui soit en mesure de fonctionner au son de sa voix.
Un jeune laborantin, assis à son petit bureau, rédige son cursus qu’il va joindre au dossier qu’il a élaboré pour répondre à l’annonce faite par un groupe pharmaceutique puissant.
Ce groupe de pointe en matière de recherche scientifique industrielle souhaite recruter, dans les mois qui viennent, des ingénieurs de talent et leur offre un pont d’or pour s’adjoindre les services de collaborateurs privilégiés. Cette compagnie américaine propose des conditions de travail et de vie valorisantes, en particulier un laboratoire équipé des tous derniers perfectionnements techniques et un logement de fonction décent, toutes choses quasiment inconnues chez nous.
Un médecin émérite dans le domaine de la chirurgie plastique de reconstitution tissulaire qui a voué sa vie à rendre un visage humain aux accidentés et particulièrement aux grands brûlés, se trouve à la barre d’un tribunal pour expliquer aux juges les raisons du décès accidentel d’un patient qu’il a opéré et dont la famille lui réclame des indemnités qu’il n’est pas en mesure de payer, sa compagnie d’assurance l’ayant radiée, au prétexte que ce client lui coûtait trop cher en indemnités et n’était plus rentable.
Cette énumération de situations n’a aucun point commun qui pourrait les rapprocher, les unir, du moins en apparence.
A y regarder de plus près et analyser ces cas de figure de la vie moderne on constate qu’un point de convergence les rapproche.
Tous ces hommes ont en commun la fibre créatrice qui les porte et les motive.
Ce don du ciel leur permet d’offrir à leurs concitoyens, dans le domaine qui les concerne, un plus, une bonification, un mieux être dans la vie des femmes et des hommes de notre société.
Ces altruistes sont légions et je tiens ici à les saluer respectueusement.
Un autre point les unit tous.
C’est la difficulté à pouvoir faire valoir le mérite de leur travail.
Combien de médecins, de chercheurs, de scientifiques de haut niveau s’expatrient, parce qu’ils ne trouvent plus, chez nous, les conditions pour pouvoir s’épanouir dans leur travail ?
Pourquoi gèle-t-on les crédits affectés à la recherche ?
Pourquoi, les intermittents du spectacle ont-ils tant de difficultés à pouvoir travailler sereinement ?
Pourquoi claque-t-on la porte au nez de certains artistes venus présenter des projets de qualité en demandant une aide qu’on leur refuse ?
Pourquoi certains enseignants se voient-ils dans l’obligation d’annuler des projets pédagogiques sous prétexte que ces projets sont innovants et ne rentrent pas dans le cadre du programme fixé par l’éducation nationale ?
Je pourrais ainsi multiplier à l’infini le nombre de questions qui découlent d’une situation politique générale qui a mis de côté, depuis bien longtemps, la valorisation du citoyen dans l’épanouissement de son intellect.
En effet, un cerveau bien nourrit et bien oxygéné est plus à même de développer un sens critique aigu, et donc d’appréhender les pièges qu’on lui concocte.
En d’autres termes, ce cerveau est dangereux pour le pouvoir en place car il est en mesure de contester.
Il peut tout à fait faire vaciller puis s’écrouler l’édifice, réduisant à néant les efforts de certains hommes politiques mesquins qui s’évertuent à vouloir conserver les privilèges dont ils bénéficient.
Ces gens, politiquement correct en apparence, c’est du moins l’image de respectabilité qu’ils veulent donner de leur personne, promettent la lune pour pouvoir garder coûte que coûte la jouissance du pouvoir.
Ils se sentent près, si le besoin s’en faisait sentir, à vendre leur âme au diable.
La conscience est intérieure et ne laisse pas transparaître sa couleur après tout !
C’est heureux pour certains dont l’âme est si noire qu’ils ne pourraient prétendre, si leur conscience était visible, à aucun poste quel qu’il soit, encore moins à exercer des responsabilités politiques qui nécessitent de la part de ceux qui embrassent cette noble carrière abnégation et altruisme, toutes qualités dont ils sont dépourvus.
Le pouvoir en place préfère, à l’épanouissement de ses concitoyens, au mieux-être social, une culture du profit au service et au bénéfice d’une minorité agissante et reconnaissante.
Les nantis préfèrent partager et manger le gâteau de la richesse entre eux plutôt qu’en offrir, par largesse philanthropique, un morceau aux besogneux qui leur permettent de s’enrichir outrageusement chaque jour.
Pourquoi le ferais-je se disent-ils ?
Quelle raison aurais-je de donner, de me priver du profit dont je me délecte chaque jour ?
Je vais citer un exemple pour illustrer mes propos.
Le gouvernement en place a fait de nobles promesses à l’un de ses actuels ministres en vogue qui jouit, en apparence, d’une excellente image auprès d’un large public.
Cette image flatteuse n’est en fait que le résultat de coups de projecteurs braqués sur le Monsieur en question, au demeurant sympathique.
Elle est destinée à donner l’illusion que la dernière mouture du gouvernement bénéficie de sang neuf, d’hommes nouveaux qui vont accomplir des « miracles »
En fait, cette opération, ce calcul électoraliste, cette préparation « psychologique » en direction des citoyens n’a d’autre but évident, calculé par les stratèges du pouvoir, que de donner l’illusion que le gouvernement se penche sur le problème du social, tentant en cela de rehausser la piètre image qu’il donne de lui-même auprès du public.
Pour ce faire il n’hésite pas à marcher sur les plates-bandes de son valeureux adversaire afin de donner de lui-même une illusion nouvelle de respectabilité.
Ce ministre a donc annoncé, à grands renforts de coups médiatiques, la création d’une quantité pléthorique de logements sociaux.
Il a déclaré, avec une conviction qui donnait une impression de sérieux, avoir obtenu des crédits dont le montant ferait pâlir d’envie et empêcherait de dormir bon nombre de puissants s’ils devaient gérer, à titre personnel, une telle somme.
Ce ministre n’est pas en mesure aujourd’hui de faire construire le moindre logement, les crédits promis n’ayant pas été prévus au budget et n’étant donc forcément pas déblocages puisque virtuels.
Un autre exemple significatif.
L’actuel ministre de l’éducation nationale est en train « d’essuyer les plâtres » et de « payer l’addition » de ses prédécesseurs.
Il a tenté, pour calmer les esprits, de concevoir dans la précipitation, une réforme mal pensée, mal ficelée, mal sentie et donc forcément mal perçue.
Cette réforme est en train de se retourner contre lui et fait nombre de mécontents, y compris dans son camp (un comble !)
Il va revenir, lui aussi, sur ses décisions en lâchant du lest, en donnant des miettes aux affamés dont il a la charge.
La faim faisant sortir le loup du bois, ce loup peut, à force de privations, avoir contracté la « rage » et s’en prendre à son soigneur pour tenter de le dévorer(la « rage du mammouth », apparue dans les années 80, est redoutable et peut-être mortelle pour un ministre inutilement exposé)
Le soigneur, finalement pas si bête, préfère se faire dévorer un bras plutôt que le corps tout entier (on vit très bien avec un seul bras, ou avec un œil de verre lorsque l’on dispose d’un compte en banque d’un montant confortable !)
Tout cela pour dire simplement que les gens qui nous gouvernent n’ont pas les moyens de leur politique ou plutôt ne veulent et ne peuvent, de toute façon, pas les avoir.
On ne peut pas se pencher réellement et efficacement sur les problèmes journaliers de la France d’en bas (comme se plait à la nommer et persiste à le faire, avec un ton méprisant et dédaigneux, notre actuel Premier Ministre) en ayant présent à l’esprit une foule de préoccupations personnelles qui ont pour nom, pour les principales, « profit, appât du gain, conservation et sauvegarde de ses privilèges ».
Ces choses ne sont pas miscibles et totalement incompatibles entre elles.
Le regard vers l’autre et le souci de son quotidien, de son mieux-être, nécessitent, de la part du « politique », une débauche d’énergie, un combat de tous les instants qui ne rapportent qu’un soupçon de gloire mais ne génèrent aucun profit.
Ces grandes idées altruistes n’intéressent pas une certaine frange de politiciens qui ne sont là que parce que « la place et la soupe sont bonnes » (ne dit pas non, j’en connais et tu les connais aussi bien si ce n’est beaucoup mieux que moi!)
Pour terminer ce billet d’humeur et revenir sur la création, elle nécessite, pour pouvoir s’exprimer, une volonté « politique » et de réels moyens.
Cet investissement est nécessaire pour permettre à l’homme de grandir et s’épanouir sereinement
J’espère avoir fait pétiller tes neurones.
Jean Claude Lataupe
Pamphlétaire
Printemps 2004